Est-ce que rembourser un compte courant d’associé peut être une faute de gestion ? « Non », pour un dirigeant qui en a bénéficié. « Oui », pour le liquidateur de sa société mise en liquidation judiciaire…

Rembourser un compte courant d’associé : c’est (parfois) une faute de gestion !

Une société achète les parts sociales composant le capital d’une autre société à un couple. Peu après, un litige survient entre la société et le couple à propos de la garantie de passif. Ce litige est tranché par la justice un 7 décembre 2010. Le juge donne alors raison au couple qui possède une créance d’environ 166 000 €.

Le 10 et 15 décembre 2010, le dirigeant de la société procède au remboursement de son compte courant d’associé ainsi qu’à celui de l’autre associé, à concurrence respectivement de 100 000 € et de 50 000 €.

Par la suite, le dirigeant déclare l’état de cessation de paiement et la société est placée en liquidation judiciaire. Un liquidateur est alors nommé.

Ce dernier va demander à ce que le dirigeant soit condamné à combler une partie du passif de la société, l’insuffisance d’actif de la société ayant été, selon lui, due en grande partie au remboursement des comptes courants d’associés. Pour le liquidateur, il s’agit d’une faute de gestion caractérisée.

Mais le dirigeant refuse : le remboursement des comptes courants d’associés ne peut pas être fautif puisqu’il s’agit là d’un droit absolu des associés, qui ne peut pas être remis en cause.

« Faux » répond le liquidateur : le remboursement des comptes courants d’associés est fautif lorsqu’il constitue un paiement préférentiel au détriment des créanciers de l’entreprise.

Or, ici, le dirigeant a procédé au remboursement des comptes courants d’associés pour éviter de verser les sommes dues au couple avec lequel la société avait perdu un litige en justice. Concrètement, en procédant à ce remboursement, le dirigeant savait qu’il privait la société de toute trésorerie : dépourvue d’actifs disponibles, la société ne pouvait pas exécuter sa condamnation judiciaire. Pour le liquidateur, le dirigeant doit donc être condamné à combler le passif de la société, à hauteur du remboursement des comptes courants, soit 150 000 €.

« Exact » confirme le juge : le dirigeant a effectivement commis une faute de gestion qui justifie qu’il comble le passif de la société à hauteur de 150 000 €.

Source : Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 24 mai 2018, n° 17-10119

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